Production agricole : Le système Faguibine en péril

Véritable écosystème, jadis source nourricière de toute la sous-région, le système Faguibine fait partie des ensembles géophysiques du Mali. À cheval sur plusieurs communes du Cercle de Goundam dans la Région de Tombouctou, la mise en valeur du Faguibine est un véritable défi agro-climatique et humain pouvant avoir un impact économique à très haute valeur ajoutée

Publié jeudi 29 décembre 2022 à 06:18
Production agricole : Le système Faguibine en péril

 Il existe un véritable problème de remplissage du lac
 

Le premier ingénieur du monde, c’est la nature, pourrait-on dire. Cette zone de culture par excellence comprend cinq lacs naturels (Télé, Takara, Faguibine, Gouber et Kamango) qui se remplissent au gré de la crue du bras du fleuve Niger par ordre de remplissage, à travers des axes hydrauliques. à cette hydrologie, s’ajoutent sur plusieurs milliers de km2, des plaines inondables du Kessou et du Kili en amont du système.

Des mares éparses et des dépressions sont en aval. L’agriculture y est plurisectorielle (cultures, élevages, pêches) ainsi que l’exploitation des autres ressources naturelles: bois, pâture, etc. C’est le seul endroit du pays où on peut produire toutes les spéculations (cultures céréalières, cultures sèches, légumineuses, racines, fruits, fourrages, etc.). Chaque secteur de la production est lui-même d’une grande diversité avec, en ce qui concerne les cultures, 7 grandes familles de systèmes.

Avant la sècheresse des années 1970, la production céréalière était estimée à 400.000 tonnes, produites parallèlement à l’exploitation d’une superficie de bourgoutières de 4.000 ha, se souvient Abdoulaye Diarra, directeur général de l’Office pour la mise en valeur du Système Faguibine (OMVF). Les années de bonne crue, la production de poisson atteignait 5.120 tonnes.


Mais à partir des années 1970, le système Faguibine, auparavant perçu comme le grenier des régions du Nord et du Sud mauritanien, est devenu une zone de grande précarité alimentaire. Au cours du siècle dernier, le système a connu une alternance de phases d’inondations et d’assèchements marquées dans les années 1970 et 1980 par des périodes de sècheresse majeures. Ces effets liés au changement climatique ont eu pour conséquences de réduire régulièrement la crue du marigot de Goundam et l’alimentation en eau des chenaux du «Tassakane» et du «Kondi», clef de voûte de l’alimentation du système.

 Le niveau actuel moyen de pluviométrie (150 mm par an) représente une contrainte majeure aux options de développement et scenarios de subsistance des populations, souligne Abdoulaye Diarra. Les niveaux des eaux relevés au cours des dernières années dans la cuvette principale n’ont en effet permis qu’une inondation occasionnelle de la partie sud-est du lac Faguibine à l’endroit où dans des circonstances optimales, l’agriculture de décrue est possible sur 180 à 350 km2 d’argiles très fertiles, avec en plus de 70 à 100 km2 de pâturage de saison sèche le «bourgou» dans les parties les plus basses de la cuvette.

 

DÉGRADATION DU TISSU SOCIAL- Depuis l’assèchement complet du lac en 1983, les apports d’eau du fleuve Niger restent trop faibles et la décrue complète chaque année découvre toutes les terres du lac Faguibine. Dès lors, les maximums atteints par les crues correspondent à l’inondation des terrains de Mbouna et de Tin-Aïcha. Aujourd’hui, il existe un véritable problème de remplissage du lac, qui constitue un phénomène structurel, regrette le directeur de l’OMVF.

Depuis quelques décennies, les ressources sont en perpétuelle dégradation suite aux effets néfastes du changement climatique et des conflits récurrents. La production agricole souffre du manque d’eau. Les ressources pastorales, fauniques et halieutiques ont quasiment disparu. Tout cela a de nombreuses répercussions sur l’ensemble des secteurs de production et a conduit à la pauvreté et la dégradation du tissu social dont l’une des conséquences graves est la rébellion et les conflits intercommunautaires.

Presque laissée à elle- même, la zone du Fagibine demande pourtant une attention particulière au regard des enjeux de stabilité, de paix, de développement et de sécurité à la frontière avec la Mauritanie et dans la zone centre du Mali.

Clef de voûte des tensions locales, le partage des ressources et des territoires s’est cristallisé au fil du temps. Les réformes agraires entreprises par les différentes administrations entre 1960 et 1973 ont été autant de facteurs de fragilisation de la stabilité sociale au cœur de l’équilibre séculaire entre sédentaires et nomades. Au-delà de la rupture de confiance entre les populations, l’État malien et ses administrateurs territoriaux, la situation est aujourd’hui plongée dans un statu quo.

La question foncière apparaît comme la partie visible et tangible d’un mal profond qui interpelle l’histoire du pays et l’évolution des dynamiques sociales sur fond de rivalités intra-communautaires et interpersonnelles (entre propriétaires et métayers), mais aussi de déstabilisation du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest par des organisations de radicaux et des groupes criminels exploitant les tensions existantes et dressant les populations les unes contre les autres à des fins politiques et de trafics en tous genres.

C’est pourquoi, il est aujourd’hui urgent de réhabiliter le système Faguibine qui se meurt, alerte Abdoulaye Diarra. Lors de la campagne écoulée, les prévisions de production qui visaient les 1.218.375 tonnes, toutes spéculations confondues n’ont pas rencontré un grand succès, faute d’investissement. Le financement du Royaume de Norvège à hauteur de 6 milliards de Fcfa est arrivé à terme depuis plus de 2 ans et n’a pas été renouvelé. à cause de la crise sécuritaire, tout le personnel s’est replié à Bamako. L’OMVF fonctionne aujourd’hui avec uniquement les ressources de l’État qui sont insignifiantes pour entreprendre des actions.

Cheick Amadou DIA

Lire aussi : Cadre de concertation avec les Maliens établis à l’extérieur : Pour renforcer le dialogue, la cohésion et l’unité au sein de la diaspora malienne

La session inaugurale de deux jours ouverte hier à cet effet se penchera sur les principales préoccupations de nos compatriotes à l’extérieur avec des recommandations pour une meilleure gouvernance migratoire.

Lire aussi : Médiateur de la République : Le crédo de la formation continue

Une trentaine d’agents du Médiateur de la République suivent une formation de perfectionnement en rédaction administrative dispensée par l’École nationale d’administration (ENA). Cette session de cinq jours, présidée par le Médiateur de la République, Mme Sanogo Aminata Mallé, a déb.

Lire aussi : Profession d’architecte : Les architectes de l’espace uemoa autorisés à exercer au Mali avec droit de libre circulation et d’établissement

Dans une vision globale, l’architecture est reconnue comme l’art de concevoir, d’organiser les espaces et les bâtiments. Le texte adopté par l’organe législatif renforcera le niveau de formation dans le domaine, mais aussi son accréditation dans notre pays et l’espace Uemoa.

Lire aussi : Région de Bougouni : L’armée détruit deux bases des groupes terroristes

Les Forces armées maliennes (FAMa) continuent avec abnégation leur mission d’escorte des camions transportant du carburant dans notre pays. C’est ainsi que dans le cadre d'une mission d'appui aérien au profit d'un convoi de carburant sur l'axe Kadiana-Kolondiéba-Bougouni, l' aviation a effec.

Lire aussi : 2è session du Collège des Chefs d’Etat de la Confédération AES : C'est parti pour la réunion des Hauts fonctionnaires

Le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Abdoulaye Diop, a présidé, ce lundi 15 décembre, l'ouverture des travaux des Hauts fonctionnaires de la Confédération AES devant se tenir jusqu'au18 décembre dans notre pays..

Lire aussi : Sécurisation du territoire : Plusieurs terroristes neutralisés par les FAMa

Entre opérations terrestres ciblées et frappes aériennes de précision, les Forces armées maliennes (FAMa) ont mené, du 12 au 14 décembre 2025, une série d’actions offensives contre des groupes armés terroristes dans plusieurs régions du pays. L’état-major général des Armées dresse .

Les articles de l'auteur

Extraction d’or dans les cours d'eau : Fini le laxisme !

La journée du vendredi 12 décembre 2025 marque la fin des opération de traque, de saisie et de destruction des engins artisanaux servant à la recherche de l’or dans les cours d'eau et sur leurs rives bordant les forêts, dans la Région de Bougouni. Plus d’une centaine de dragues et de machines «cracheur» ont été mises à feu au grand dam de leurs propriétaires.

Par Cheick Amadou DIA


Publié lundi 15 décembre 2025 à 10:14

Sauvegarde du fleuve Niger : La chasse aux dragues

Le ministère de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable mène une lutte implacable contre ces engins très polluants utilisés pour extraire l’or du fond des cours d’eaux. L’objectif est clair : retrouver toutes les dragues partout où elles se trouvent, les saisir et les détruire.

Par Cheick Amadou DIA


Publié jeudi 11 décembre 2025 à 08:50

Fonds vert pour le climat : L’ambassadeur Seyni Nafo au poste de co-pilote

Depuis janvier 2025, notre compatriote est le co-président du Fonds vert pour le climat (FVC) au nom des pays en développement, regroupant plus de 150 États dont le Mali. Le Green climate fund (GCF) en anglais ou le Fond vert pour le climat est la plus grande ressource financière multilatérale pour le climat au monde. Avec près de 60 milliards de dollars US (environ de 34.000 milliards de Fcfa) de portefeuille..

Par Cheick Amadou DIA


Publié jeudi 27 novembre 2025 à 08:45

BNDA-SFI : plus de 23 milliards de Fcfa pour soutenir les PME maliennes

L’hôtel Radisson Collection de Bamako a abrité, le jeudi 30 octobre, la cérémonie de signature de convention de financement entre la Banque nationale de développement agricole (BNDA) et la Société financière internationale (SFI). Par cette signature, la SFI met à la disposition de la BNDA plus de 23,341 milliards de Fcfa.

Par Cheick Amadou DIA


Publié lundi 03 novembre 2025 à 10:56

Paiement numérique : La BCEAO lance la PI-SPI

Cette plateforme interopérable du système de paiement instantané (PI-SPI), permet d’envoyer et de recevoir de l’argent instantanément entre différentes banques, émetteurs de monnaie électronique, institutions de microfinances et établissements de paiement. Chaque citoyen de la zone Uemoa peut effectuer des opérations de transaction simples, sécurisées et facilement accessibles en quelques secondes, 24h sur 24 et 7 jours sur 7.

Par Cheick Amadou DIA


Publié mercredi 01 octobre 2025 à 09:08

Financement climatique : Une gestion «Kafkaïenne» des fonds

En 2015, à Paris, dans la capitale française, un Accord historique sur le climat a été adopté par 197 pays du monde. Il consacre un financement substantiel des actions de lutte contre le dérèglement climatique par les pays riches en faveur des plus pauvres, vulnérables au phénomène. La cagnotte, loin d’être remplie, est aussi soumise à une règle procédurale et administrative qui rend son accès difficile pour ses bénéficiaires.

Par Cheick Amadou DIA


Publié jeudi 14 août 2025 à 11:21

Insécurité alimentaire : Le plan national de réponses 2025 financé à hauteur de 12,74 milliards de FCFA

Lancé hier par le Président de la Transition, le Général d’armée Assimi Goïta, ce plan prévoit de fournir une assistance alimentaire à 2,3 millions de personnes vulnérables à travers le pays.

Par Cheick Amadou DIA


Publié mercredi 13 août 2025 à 08:23

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner