Dr Aly Tounkara sur les médias publics, terrorisme et Transition politique : «il est important, dans les analyses des journalistes, de mettre en dialogue les différents facteurs pour comprendre le phénomène»

L’enseignant-chercheur a apporté des éclairages sur des concepts souvent galvaudés par les journalistes dans les analyses. Il invite succinctement à se garder de commentaire hâtif, sans une compréhension approfondie et d’avoir une rigueur éthique

Publié mercredi 29 octobre 2025 à 12:44
Dr Aly Tounkara sur les médias publics, terrorisme et Transition politique : «il est important, dans les analyses des journalistes, de mettre en dialogue les différents facteurs pour comprendre le phénomène»

«Quels défis pour les médias publics dans un contexte de terrorisme et de Transition politique», c’est l’un des thèmes débattus, hier au Centre international de conférences de Bamako (CICB), lors de la table ronde organisée dans le cadre des journées de relance de l’Agence nationale de presse.

Le conférencier était  Dr Aly Tounkara, enseignant-chercheur et directeur du Centre des études sécuritaires et stratégiques au Sahel (CE3S). Il a apporté des éclaircissements sur cette question qui domine l’actualité de notre pays . Il s’agit, selon lui, de comprendre les attitudes à adopter par les journalistes dans les jugements portés sur le terrorisme.

Pour le conférencier, quand on suit les médias à propos du terrorisme, on se rend compte qu’il y a quand même un seul problème de compréhension du phénomène. «Certains parleront de djihadistes, terroristes, extrémistes violents. Finalement, le lecteur ou l’interlocuteur n’arrive plus à les situer. Or, il se trouve que chaque expression utilisée pour qualifier le terrorisme a une connotation.


Dr Aly Tounkara poursuit les explications : Je prends par exemple le cas du djihad. Lorsque vous qualifiez une action violente au nom du djihad, naturellement cela demande au journaliste, non pas d’être un théologien, mais de comprendre quelles sont les implications du terme, du point de vue de l’expression arabe. Il y a des auteurs, des chercheurs très contemporains, vous diront que rien que le mot djihad a plus de 70 significations. Parmi celles-ci, il n’y a qu’une seule qui voudrait dire l’action violente, le djihad al-qital. Quand vous lisez par exemple les travaux de l’égypto-américain Mark A. Gabriel, il a fait une œuvre  qui s’appelle «L’Islam et le terrorisme» dans laquelle, il revient sur ces compréhensions conceptuelles du terme. Pour vous dire que les termes sont extrêmement importants lorsque vous voulez les consigner dans un travail scientifique ou dans un travail journalistique.

Et de poursuivre : «L’autre élément important toujours à propos de cette compréhension des concepts, j’entends certains dire que c’est juste l’injustice sociale, c’est juste l’insuffisance de l’utilité sociale de l’État, c’est juste le manque d’opportunités d’emplois pour les jeunes. Faites attention à cela parce que lorsque l’on évoque le terrorisme, très souvent dans la recherche, on parle de trois éléments à mettre en dialogue ensemble. Le premier élément, c’est d’abord de se dire qu’il n’y a pas qu’un seul facteur qui pourrait expliquer le terrorisme. Il n’y a pas que l’injustice sociale, il n’y a pas que le fait religieux, il n’y a pas que le sentiment de la non-utilité sociale de l’État, il n’y a pas que le peu de bienveillance  de services sociaux de base. Mais plutôt, il faut avoir à l’esprit que le terrorisme s’appelle une connexion avec les facteurs. En fait, il n’y a pas qu’un seul facteur.»

Selon les analyses d’Aly Tounkara, il est extrêmement important que les journalistes dans leurs analyses mettent en dialogue les différents facteurs pour comprendre le phénomène. «L’autre élément, c’est aussi de dire attention, non seulement il y a une nécessité de mettre cette connexion avec le facteur, mais également de se dire que les profils des acteurs, des entrepreneurs de l’environnement, sont des profils aussi qui sont très hybrides. D’ailleurs, si vous regardez un peu dans le contexte malien, de 2012 à aujourd’hui, vous allez vous rendre compte qu’on parlait tantôt de certains chefs terroristes comme Ben Moktar ou Sahrawi. Mais lorsque vous regardez un peu les éléments qui étaient avec ce groupe en 2012, et voir aujourd’hui la configuration actuelle, que ce soit avec l’État islamique, avec le Groupe soutien à l’islamo-musulman, sans occulter ce qui se passe aujourd’hui entre le Mali et le Sénégal, vous allez vous rendre compte que non seulement les profils omîtes, mais dans le même temps, les raisons qui soutenaient la violence sont aussi très complexes et dynamiques. Malheureusement, on a l’impression que le phénomène est homogène.

 

DES RÉFÉRENTIELS À NE PAS NÉGLIGER-«En fait, si vous suivez un peu les différentes déclarations en lien avec le fait que les citernes sont incendiées, le fait que certaines expériences sont aujourd’hui coupées de la part de groupes radicaux violents, le référentiel des religieux est brandi. Mais derrière le référentiel des religieux, quand on est journaliste, il est quand même extrêmement important de se dire oui, c’est vrai, quand «Diarra» fait ses apparitions médiatiques, il brandit le référentiel musulman pour justifier pourquoi aujourd’hui les citernes sont attaquées. Mais en votre qualité de journaliste, il est extrêmement important que vous ne devenez pas trop des théologiens, mais il est quand même utile de comprendre quels sont les versets susceptibles d’être utilisés par les groupes radicaux violents pour légitimer une action violente.

En passant par Oussama Ben Laden, Iyad Ag Ghali, Amadou Koufa, on a globalement 13 versets qui sont mobilisés. Il est extrêmement important que vous sachiez comment ces versets ont été révélés, quels sont également les contextes des révélations, est-ce que ce sont des versets globalisants, est-ce que ce sont des versets intemporels ? Donc, ça c’est extrêmement important de le savoir. Maintenant pour finir, en termes de recommandations, c’est vrai qu’il est difficile de comprendre aisément, qu’on soit chercheur ou qu’on soit journaliste de travailler sur des thématiques aussi sensibles.

Pour Ali Tounkara, le travail de journaliste ou de chercheur exige donc une grande rigueur éthique. Les professionnels doivent s’efforcer d’éviter les simplifications excessives qui masquent la complexité des comportements humains. Il estime que l’analyse doit s’orienter vers la compréhension des facteurs socio-économiques, historiques et psychologiques qui poussent à la violence, plutôt que de se limiter à des éléments identitaires. C’est à travers cette compréhension approfondie que l’on peut espérer contribuer à une société qui ne se laisse pas emporter par des généralisations hâtives.

Seibou Sambri KAMISSOKO

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