Dr Djédi Kaba Diakité : «l’assistance médicale à la procréation, du pain béni pour l’humanité»

Dans cet entretien, le spécialiste en traitement microchirurgical des stérilités aborde l’adoption, en mai dernier, de la loi modifiée portant Assistance médicale à la procréation. Dr Djedi Kaba Diakité développe aussi les acquis et les défis de cette avancée de la médecine

Publié mercredi 09 juillet 2025 à 09:32
Dr Djédi Kaba Diakité : «l’assistance médicale à la procréation, du pain béni pour l’humanité»

 Selon des thèses de la Faculté de médecine et d’odonto-stomatologie, l’infertilité touche entre 19 à 28% des couples maliens. Elle représenterait 70 à 80% des motifs de consultation dans les services de gynécologie. Face à l’infécondité de certains couples, l’Assistance médicale à la procréation (AMP) reste une réponse à l’aspiration à la parenté de ces couples infertiles. La pratique a acquis droit de cité dans notre pays depuis des lustres, même si notre pays a mis du temps à légiférer sur l’AMP qui fait sens et de plus en plus consensus au sein des couples infertiles.

 Ce cap est aujourd’hui plus ou moins franchi, parce que la pratique est désormais encadrée par la loi n°2016-066 du 30 décembre 2016. Ce texte a révélé des insuffisances liées à l’évolution des sciences médicales, biologiques et sociologiques. Ainsi, le Conseil national de Transition (CNT) a voté, le 12 mai dernier, une modification de la loi portant notamment l’âge limite de recours à l’AMP à 49 ans. La réforme ambitieuse r
emet sur la table le débat sur les acquis et les perspectives de cette avancée médicale.

Le Dr Djédi Kaba Diakité de la Clinique Kabala, spécialiste en gynéco-obstétrique, traitement microchirurgical des stérilités en AMP, qui passe pour le précurseur de la pratique, explique largement le sens et la portée de cette révolution de la médecine. Les spécialistes expliquent que l’AMP est un ensemble de méthodes cliniques et biologiques permettant de résoudre un problème d'infertilité. Pour s’enquérir de la réalité pratique, notre équipe de reportage  a été reçue par le gynécologue-obstétricien dans sa clinique où des pans du mur sont tapissés de certificats médicaux et d’attestations de reconnaissance de parents ayant eu recours à l’AMP avec satisfaction. Il s’empresse de préciser que la loi 2016-066 était très restrictive et devait évoluer pour permettre à tous les couples infertiles d’y recours.


En ce qui concerne la loi de 2025, le praticien émet des réserves quant à l’augmentation de l’âge limite du recours à l’Assistance médicale à la procréation, en ce sens que la fertilité de l’être humain baisse. «Auparavant, les femmes jusqu’à 50 ans pouvaient avoir des enfants. Maintenant, la limite est de 35 ans. Celles qui ont plus de 40 ans, quand tu les prends en fécondation in vitro, le taux de réussite est presque égal à 0 parce que la qualité ovocytaire (ovule) diminue avec l’âge», explique celui qui sait de quoi il parle.

  Il précise aussi que les femmes au-delà de 40 ans doivent recourir à des dons d’ovocytes po
ur procréer. Malheureusement, cette technique reste interdite au Mali. À l’en croire, l’âge avancé reste un facteur limitant que la loi ne peut ignorer. Cet état de fait, indique Dr Djedi Kaba Diakité, condamne un tiers des Maliennes qui ne pourront pas bénéficier de l’AMP, si l’on s’en réfère à des thèses. Sans complaisance, Dr Diakité soutient que notre pays dispose de compétences en matière d’AMP. «Nous sommes prêts à répondre aux besoins des couples infertiles», soutient-il.

 

MÉTHODE DE REMÉDIATION- Le spécialiste explique qu’on parle de l’infertilité d’un couple par l’absence de grossesse après 12 à 24 mois de vie en couple avec des rapports intimes réguliers (au moins deux à trois fois par semaine) sans contraception. Ajoutant que statistiquement, 50 % des couples conçoivent dans les trois premiers mois suivant le mariage, 85 % au bout de six mois. Les 15 % restants alimentent le taux d’infertilité. En ce qui concerne les principales techniques qu’offre l’AMP, Dr Djedi Kaba Diakité en cite trois. Il s’agit de l’Insémination artificielle avec sperme du conjoint (IAC), de la Fécondation in vitro (FIV) et l’Injection intracytoplasmique de spermatozoïde (ICSI). Par ailleurs, il indique qu’à ce jour, le Mali ne compte que quatre centres qui pratiquent  l’AMP dont un dans le secteur public. 

De nombreux bébés sont nés de l’AMP à la clinique Kabala. Notre interlocuteur indique que le taux de réussite dépend de l’âge moyen du couple. Plus de 50% chez les femmes de moins de 25 ans, environ 40% chez la tranche d’âge de 25 à 35 ans. Enfin 30% jusqu’à 40 ans et moins de 20 % au-delà. Par ailleurs, le spécialiste assure que les enfants nés de l’AMP ne présentent pas de différences notables en termes de santé ou de développement par rapport à ceux qui sont conçus naturellement. «Ils sont même souvent plus intelligents. Parce qu’on sélectionne les meilleurs spermatozoïdes, les ovocytes les plus sains, les embryons les plus viables. C’est un tri naturel renforcé par la science», argumente-t-il. Signalant qu’avant toute intervention, un bilan médical complet est réalisé sur les deux partenaires.


Le gynécologue rappelle que dans le monde, le premier enfant conçu par FIV c’était en 1978. Depuis cette date, se réjouit-il, des progrès considérables ont permis à de nombreux couples de satisfaire leur aspiration à la parenté. Et de dire que la pratique permet d’éviter la transmission de certaines maladies génétiques à la descendance. «C’est devenu comme un traitement aussi. Ça peut aider à ne pas transmettre aux enfants certaines maladies. C’est du pain béni pour l’humanité», déclare le spécialiste en traitement microchirurgical de l’infertilité, avant d’ajouter qu’il s’agit bien de méthodes codifiées qui s’améliorent avec de bons taux de réussite dans notre pays.

«Le taux de réussite n’est pas normalement supérieur à 35% dans les pays européens, du fait qu’ils ne transfèrent qu’un seul embryon. Nous, on a de bons résultats au-delà de 50% parce qu’on transfère jusqu’à 3 embryons», soutient le gynécologue qui indique que le stress reste l’une des causes principales de l’infertilité.  En outre, Djédi Kaba Diakité déplore les croyances et convictions religieuses qui continuent de peser sur les méthodes. Certains évoquent des questions d’éthique.

Si le catholicisme s’oppose fermement
à l’AMP, dit le spécialiste, prônant plutôt l’adoption, l’islam l’autorise tant que la procédure se déroule entre époux légitimes. Et d’indiquer que la sélection du sexe est permise uniquement en cas de maladie génétique ciblée. Quant au protestantisme, mentionne le spécialiste, il se montre le plus ouvert dès lors que la démarche vise à donner la vie. Face à la situation, le champion de l’AMP appelle à une ouverture réglementaire de la pratique «en tenant compte de nos réalités». Il recommande aussi la multiplication des centres tout en soutenant ceux déjà existants.

Fatoumata KAMISSOKO

Lire aussi : Tombouctou : Les communautés pleurent la perte de l'imam de la grande mosquée de Djingareyber

De son vrai nom Abdrahmane Ben Esaayouti, le grand imam a tiré sa révérence ce mercredi 10 decembre 2025. Il a été accompagné à sa dernière demeure par une foule nombreuse de fidèles, d'amis et de parents..

Lire aussi : Fonction publique d'État : Le recrutement de 926 agents contractuels lancé

Les autorités de la Transition ont décidé de combler au niveau de la Fonction publique d'État les insuffisances en termes de personnel de l'administration relevant du Code du travail..

Lire aussi : Abdoul Niang Journaliste, analyste politique et influenceur sur les réseaux sociaux : «L’ESSOR et L’ORTM gardent encore une place essentielle dans la communication d’État, la diffusion des politiques publiques et la valorisation des institutions»

Pour Abdoul Niang, il est évident pour tout le monde que ces deux médias publics ont marqué leur époque. L’ORTM est la principale source d’information audiovisuelle au Mali depuis plusieurs décennies. Quant à l’Essor, en tant que journal d’État, il est la référence écrite officiell.

Lire aussi : Kayes : La lutte contre le Sida ne faiblit pas

Le VIH/Sida représente un réel problème de santé publique à l’échelle planétaire.

Lire aussi : Sikasso : Réformes politiques, institutionnelles et électorales au cœur d’une rencontre

-.

Lire aussi : Université publique de Gao : Le ministre Kansaye entend accélérer son opérationnalisation

Dans le cadre de l’opérationnalisation effective de l’Université publique de Gao, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Pr Bouréma Kansaye a entamé, le week-end dernier, une visite dans la Cité des Askia qu’il bouclera aujourd’hui. Il est accompagnÃ.

Les articles de l'auteur

2è session du Collège des Chefs d’Etat de la Confédération AES : C'est parti pour la réunion des Hauts fonctionnaires

Le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Abdoulaye Diop, a présidé, ce lundi 15 décembre, l'ouverture des travaux des Hauts fonctionnaires de la Confédération AES devant se tenir jusqu'au18 décembre dans notre pays..

Par Fatoumata KAMISSOKO


Publié lundi 15 décembre 2025 à 12:53

Une soirée pour célébrer l’engagement féminin

La star sénégalaise, l'artiste musicienne Coumba Gawlo Seck a animé, jeudi dernier au Centre international de conférences de Bamako (CICB), une conférence pour le lancement de la 2è édition du Festival international Chant des Linguère, tenue du 10 au 12 décembre dans la capitale malienne sous le thème : «La culture, levier et facteur de développement»..

Par Fatoumata KAMISSOKO


Publié lundi 15 décembre 2025 à 09:45

Télévision AES : La Maison de la presse félicite les nouveaux coordinateurs

Dans un communiqué rendu public ce samedi 13 décembre 2025, le président de la Maison de la presse, Bandiougou Danté, a félicité le nouveau coordinateur général de la Télévision AES, Salif Sanogo et son adjoint Sékou Tangara..

Par Fatoumata KAMISSOKO


Publié samedi 13 décembre 2025 à 16:44

ANPE : le budget de 2026 en baisse

Le projet de budget prévisionnel 2026 de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) s’élève en ressources et en emplois à la somme d’environ 8,20 milliards de Fcfa, contre 8,94 milliards de Fcfa en 2025, soit une baisse de 8,28%..

Par Fatoumata KAMISSOKO


Publié mercredi 10 décembre 2025 à 08:04

Guerre informationnelle : Le ministre de la Communication salue la Maison de la presse pour ses efforts

Dans un communiqué rendu public ce vendredi 5 décembre 2025, le ministre de la Communication, de l'Économie numérique et de la Modernisation de l'Administration a adressé ses félicitations et remerciements au président de la Maison de la presse.

Par Fatoumata KAMISSOKO


Publié vendredi 05 décembre 2025 à 17:38

Biennale artistique et culturelle -Tombouctou 2025 : La Commission régionale d’organisation fait le point au ministre Mamou Daffé

Le ministre de l’Artisanat, de la Culture, de l’Industrie hôtelière et du Tourisme, Mamou Daffé séjourne à Tombouctou pour les derniers préparatifs de la phase nationale de la Biennale artistique et culturelle..

Par Fatoumata KAMISSOKO


Publié jeudi 04 décembre 2025 à 10:49

Mali: La reprise du service premium du «e-passeport AES»

Dans un communiqué fait le 20 novembre 2025, le ministre de la Sécurité et de la Protection civile a informé la population de la reprise officielle des activités au niveau du service prémium du « e-passeport AES », dès le lundi 24 novembre 2025 à partir de 7 heures 30 minutes..

Par Fatoumata KAMISSOKO


Publié vendredi 21 novembre 2025 à 11:35

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner