Assainissement des rues : Si chacun balayait devant sa porte…

L’article 22 du projet de nouvelle Constitution stipule que toute personne a droit à un environnement sain et durable. En son article 25, le texte précise que la protection de l’environnement et la promotion de la qualité de la vie sont un devoir pour tout citoyen et pour l’État.

Publié vendredi 30 juin 2023 à 05:45
Assainissement des rues : Si chacun balayait devant sa porte…

Des femmes en train d’assainir une rue de la capitale à l’occasion de la Journée qui leur est dédiée


Ces dispositions confortent l’habitude des femmes qui consiste, depuis belle lurette, à assainir les devantures de leurs domiciles. La pratique connait de moins en moins d’engouement. Malgré cela, des femmes sont inconditionnellement au rendez-vous pour exécuter la tâche soit le matin de bonne heure ou dans l’après-midi.
Il est 6 heures du matin. Dans la pénombre, l’aide ménagère de la famille Samaké balaie devant une concession située à Daoudabougou en Commune V du District de Bamako. Elle le fait à la demande de sa patronne qui est à cheval sur la propreté et n’aime pas voir les ordures devant son domicile.


L’aide ménagère confie que son employeuse lui a défendu d’être paresseuse et de laisser les déchets trainer devant son habitation. Sa patronne croit dur comme fer, rapporte-t-elle, que l’assainissement de la devanture est la preuve qu’une femme existe dans une maison. Et c’est aussi un moyen de gagner l’affection de sa belle-famille. Dans le même quartier, Hawa Sangaré, une gamine de cinq ans, arrose le sol, sous l’œil vigilant de sa grand-mère. Celle-ci, une sexagénaire, affirme que ce travail préliminaire permet de ne pas soulever la poussière. Elle a de nombreuses belles-filles mais la vieille dame tient à accomplir ce devoir matinal elle-même. «C’est du sport pour moi. En plus, j’aime voir l’espace en face de ma porte dans un état propre le matin de bonne heure», confie-t-elle.



Korotim Dembélé, habite Kalaban Coura, un quartier de la Commune V du District de Bamako, est du même avis. « Il faut aimer l’hygiène pour accomplir cet exercice. Cela exige beaucoup de courage », dit-elle tout en regrettant que beaucoup de femmes prétextent ne pas avoir le temps pour l’assainissement quotidien de la devanture de leurs domiciles. C’est le cas d’Aminata Diawara, agent d’une banque de la place, qui dit manquer de temps pour entretenir son espace. « C’est ma belle-mère qui le fait. Au début de mon mariage, j’ai essayé de la remplacer mais elle n’a pas voulu », explique-t-elle, avant d’affirmer que cette décision de sa belle-mère lui est favorable.


Aïssata Daou habite Lafiabougou en Commune IV du District de Bamako. Celle qui balaye quotidiennement la devanture de sa maison est remontée contre l’une de ses voisines. « Notre voisine ne balaie pas la devanture de sa porte. Lorsque le vent souffle, ses ordures viennent salir notre espace assaini. Je lui ai conseillé de les ramasser et de les brûler mais elle ne veut rien entendre », se plaint la trentenaire.


Le quinquagénaire Bakari Tangara se souvient que la ville de Bamako était coquette parce que les femmes étaient engagées dans l’assainissement. À l’époque, la plupart étaient des ménagères. Mais aujourd’hui, regrette-t-il, celles qui se disent émancipées s’occupent de moins en moins du foyer conjugal. Auparavant, explique notre interlocuteur, les autorités locales faisaient la surveillance générale dans les quartiers, les maisons et même les toilettes pour s’assurer de l’hygiène.


DÉPENDANCE DES DOMESTIQUES- Pour le sociologue Dr Mohamed Abdoulaye Haidara, les déchets et leur gestion dépendent de l’organisation de la société et du type de consommation qui s’y trouve. Dans le temps, apprécie-t-il, toutes les rues se trouvaient bien assainies grâce à cette pratique des femmes qui consistent à balayer les devantures des concessions. À la faveur d’un éveil du mouvement social, signale l’universitaire, les femmes généralement intellectuelles parviennent à mobiliser les autres pour l’assainissement général des quartiers.  
Par ailleurs, l’enseignant chercheur indique que la professionnalisation des femmes fait partie des facteurs qui contribuent à l’abandon de  cette bonne habitude. Dans de tel contexte, argue-t-il, l’homme ne peut pas être exigeant comme auparavant quand la femme n’avait uniquement comme tâche les travaux ménagers. L’époux peut contribuer à amoindrir les activités de sa femme en employant des domestiques. Un autre phénomène urbain, dit-il, est que la plupart des maisons habitées par des familles en location brillent par leur saleté dans les rues.  Parce que ces locataires se disent que la maison ne leur appartient pas.  


Selon le sociologue, l’assainissement de la devanture doit être accompagné d’une gestion industrialisée des déchets solides et liquides pour faire face à la production excessive des ordures. Dr Mohamed Abdoulaye Haïdara propose également l’instauration des prix de propreté qui seront décernés aux femmes les plus assidues dans l’assainissement correct des devantures des domiciles. Il soutient que ce sont des initiatives qui peuvent contribuer à encourager l’ensemble de la communauté. «Dans les communautés où ce sont les femmes qui géraient généralement les questions liées à l’assainissement, il y avait peu d’ordures», explique l’universitaire avant de citer en exemple le village où les femmes se lèvent très tôt le matin pour assainir les maisons et leurs devantures. Lorsque  les femmes se détournent de cette pratique, analyse-t-il, les ordures seront abandonnées un peu partout. Cela peut provoquer beaucoup de problèmes dans l’ordre sanitaire.


L’hygiéniste Salia Sanogo partage cet avis. En faisant une analyse au plan sanitaire, informe le spécialiste, 80% des pathologies traitées dans nos hôpitaux (infections respiratoires, maladies parasitaires etc.) sont attribuables à l’insalubrité de notre environnement et à nos habitudes quotidiennes sociétales. Le praticien indique que la salubrité de notre environnement permet de maintenir l’équilibre de l’écosystème qui concerne l’espace animal, aquatique et terrestre y compris les plantes surtout comestibles. «Aujourd’hui, on compte du bout des doigts, les femmes qui s’occupent du bien-être de la famille», témoigne Salia Sanogo, avant de regretter que les femmes soient plutôt attirées par les parures de luxe à la mode. Il affirme qu’elles sont majoritairement dépendantes des domestiques quant à l’exécution des travaux ménagers. Ce sont des facteurs, estime-t-il, qui contribuent à favoriser l’insalubrité dans nos familles voire dans nos quartiers.


Face à cette pollution, déplore le spécialiste de l’hygiène, l’intervention de l’État est faible. Des insuffisances marquées par un manque criard de dépôts de transit, provoquant la création de dépôts d’ordures anarchiques à travers la ville et la mauvaise gestion des déchets liquides. Selon le praticien, il faut appliquer les textes législatifs que nous-mêmes avons élaborés pour sauver notre environnement.

Aminata SOUMAH

Lire aussi : Tombouctou : Les communautés pleurent la perte de l'imam de la grande mosquée de Djingareyber

De son vrai nom Abdrahmane Ben Esaayouti, le grand imam a tiré sa révérence ce mercredi 10 decembre 2025. Il a été accompagné à sa dernière demeure par une foule nombreuse de fidèles, d'amis et de parents..

Lire aussi : Fonction publique d'État : Le recrutement de 926 agents contractuels lancé

Les autorités de la Transition ont décidé de combler au niveau de la Fonction publique d'État les insuffisances en termes de personnel de l'administration relevant du Code du travail..

Lire aussi : Abdoul Niang Journaliste, analyste politique et influenceur sur les réseaux sociaux : «L’ESSOR et L’ORTM gardent encore une place essentielle dans la communication d’État, la diffusion des politiques publiques et la valorisation des institutions»

Pour Abdoul Niang, il est évident pour tout le monde que ces deux médias publics ont marqué leur époque. L’ORTM est la principale source d’information audiovisuelle au Mali depuis plusieurs décennies. Quant à l’Essor, en tant que journal d’État, il est la référence écrite officiell.

Lire aussi : Kayes : La lutte contre le Sida ne faiblit pas

Le VIH/Sida représente un réel problème de santé publique à l’échelle planétaire.

Lire aussi : Sikasso : Réformes politiques, institutionnelles et électorales au cœur d’une rencontre

-.

Lire aussi : Université publique de Gao : Le ministre Kansaye entend accélérer son opérationnalisation

Dans le cadre de l’opérationnalisation effective de l’Université publique de Gao, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Pr Bouréma Kansaye a entamé, le week-end dernier, une visite dans la Cité des Askia qu’il bouclera aujourd’hui. Il est accompagnÃ.

Les articles de l'auteur

Maison du Hadj : Les nouvelles directives saoudiennes

La session extraordinaire du conseil d’administration de la Maison du Hadj s’est tenue, hier à son siège à Hamdallaye. La réunion était présidée par le représentant du ministre des Affaires religieuses, du Culte et des Coutumes, Famakan dit Sékou Dionsan, en présence du directeur général de la Maison du Hadj, Dr Abdoul Fatah Cissé..

Par Aminata SOUMAH


Publié lundi 15 décembre 2025 à 09:18

Fonds de solidarité nationale : Un clin d’œil aux personnes vulnérables

Le Fonds de solidarité nationale (FSN) a lancé, vendredi dernier à son siège, huit microprojets en faveur des associations des personnes vulnérables..

Par Aminata SOUMAH


Publié lundi 08 décembre 2025 à 08:05

Fafe : Une administration mobilisée pour atteindre les objectifs

La 13è session du comité de pilotage du Fonds d’appui à l’automatisation de la femme et à l’épanouissement de l’enfant (Fafe) s’est tenu, hier à son siège..

Par Aminata SOUMAH


Publié vendredi 28 novembre 2025 à 08:41

Faculté de médecine et d’odontostomatologie : La Fondation Orange rénove la salle multimédia

La salle multimédia de la Faculté de médecine d’odontostomatologie (FMOS) au Point G, rénovée sur financement de la Fondation Orange Mali, a été inaugurée, hier. La cérémonie s’est déroulée en présence de la représentante de la Fondation Orange Mali, Fanta Diaby, en présence de la doyenne de la FMOS, Pr Mariam Sylla, du représentant du directeur général de l’Enseignement supérieur, Moussa Tamboura, et des têtes couronnées de la médecine et de la pharmacie dans notre pays..

Par Aminata SOUMAH


Publié mardi 18 novembre 2025 à 08:57

Grand marché de Bamako : «Coxeurs» et harceleurs

Ces commerciaux d’un autre genre incitent de plus en plus la clientèle à s’orienter vers les boutiques. En contrepartie, ils se retrouvent le petit soir avec des ristournes au prorata des clients drainés et en fonction des montants déboursés par ces derniers.

Par Aminata SOUMAH


Publié lundi 20 octobre 2025 à 12:59

Journée internationale de la fille : Tout pour son plein épanouissement

À l’instar de la communauté internationale, notre pays a célébré la Journée internationale de la fille que consacre le 11 octobre sous le thème national : «Situation de crises et mariage d’enfants : impact et perspectives»..

Par Aminata SOUMAH


Publié mardi 14 octobre 2025 à 07:53

Rentrée scolaire 2025 2026 : Le ministre Sy Savané échange avec les directeurs des académies d’enseignement sur les derniers réglages

Le ministre de l’Éducation nationale, Dr Amadou Sy Savané, a organisé, hier dans la salle de réunion du Centre national des ressources de l’éducation non formelle (CNR-ENF), une rencontre d’échanges avec les directeurs des Académies d’enseignement (26 directeurs d’Académies d’enseignement étaient au rendez-vous) sur les préparatifs de la rentrée scolaire 2025-2026..

Par Aminata SOUMAH


Publié vendredi 26 septembre 2025 à 08:01

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner